Fanions blancs en forme de crocodile, mégaphones hurlant de la musique mortuaire … C’est une invitation à venir, famille, voisins, passants, à venir se recueillir auprès du cercueil du mort avant la crémation qui a lieu sur un bûcher à la campagne, un four ouvert ou fermé à la ville. Le blanc est la couleur du deuil

La religion est la ressource fondamentale de la culture khmère.La croyance dans l’au-delà régit la vie quotidienne. Aucune maison n’est sans autel des ancêtres, aucune décision ne sera prise sans avoir consulté les défunts… Peu de peuples sont encore aussi croyants. Les rites qui concernent la mort, cérémonies funéraires ou cultes consacrés aux esprits des défunts, sont donc particulièrement importants. En octobre, lorsque que la saison des pluies touche à sa fin, deux semaines sont réservées à la vénération des morts. Il s’agit de la fête des morts. L’idée de la mort ne comporte en elle-même aucune tristesse, la vie d’ici-bas n’étant pour les boudhistes khmers qu’une étape parmi d’autres et une conséquence d’une longue existence jalonnées par des incarnations successives.

« Le corps que l’âme a quitté n’est rien. Bientôt il sera aussi inutile sur terre que l’arbre mort. La vie est chose éphémère. Naître et mourir se poursuivent sans arrêt, selon un rythme normal. Après être né il faut disparaitre. Le bonheur c’est d’entrer dans le Nirvâna » (prière bouddhique).La condition de l’homme, ses réussites, bonheurs et malheurs, est régie par son Kam ( karma) qui est la destinée résultant des actions accomplies au cours des vies successives. Il ne peut pas influer sur les événements de sa vie en cours. Par contre il peut accumuler des mérites pour sa vie future. En tout état de causes, si le défunt n’a pas été enterré suivant les rites, il n’aura comme vie future qu’une longue errance…

Les Cambodgiens, adeptes du Bouddhisme du Petit Véhicule, croient qu’à l’instant même de la mort, l’âme se réincarne dans un nouveau corps. La vie terrestre est une épreuve imposée à l’âme pour permettre de juger de son état de développement réel. Une fois la vie terrestre achevée, l’âme est appelée à subir la peine que méritent ses fautes dans l’étage approprié des enfers ou à jouir dans un état bienheureux plus ou moins long du fruit de ses mérites.

Pour les vivants, la place de la mort et des morts est très importante : il y a les parents morts que l’on avertit de tous les événements familliaux. Il y a les morts dangereux, par exemple les femmes mortes en couches, qui ont souvent leur habitat en forêt. Nombreux sont les morts errants que l’on peut fixer par des offrandes, attirant ainsi leur protection. Il y a aussi les Neak Ta, morts associés à un lieu plus ou moins vaste, qui administrent le monde des esprits et surveillent le territoire du Cambodge. Ils bénéficient ainsi de nombreuses offrandes et prières de la part des habitants des territoires qu’ils régissent.

En fonction du signe zodiacal, les Khmers considèrent que certains jours offrent une mort faste. De même, le jour de la semaine détermine la direction du souffle de mort auquel on doit tourner le dos lors des cérémonies pour bénéficier de l’influx de son opposé, le souffle de vie.

funérailles
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L’agonie :

crémationt_1920-50Lorsque quelqu’un est à l’agonie, on invite les moines à se rendre à son chevet afin de réciter une prière nommée « Tor », qui peut correspondre à l’Extrême-onction chrétienne, et qui est destinée à ce que l’âme ait une bonne réincarnation. De plus un Achar doit veiller sur le mourant jusqu’à son dernier souffle. Tous les parents qui ont causé du tort à celui qui agonise doivent se rendre à son chevet pour demander son pardon. On lui demande de plus de se concentrer seulement sur les bonnes actions qu’il a accompli au cours de sa vie et de ne pas s’inquiéter pour les membres de sa famille. On organise enfin de petite cérémonie consistant en offrande à base de feuilles de bananier et de bougies (« Tien Kol » ou « Tien Kalb ») que l’on fait brûler à côté de la tête et de chaque épaule du mourant.
Normalement fait avec un poids déterminé de cire vierge, le Tien Kol doit avoir une mèche de 19 fils, le nombre étant parfois porté à 32 (que les Bouddhistes considèrent être le nombre de partie du corps), ou même 56, chiffre qui symbolise les bienfaits du Bouddha.

Le moment de la mort :

crémationt_1920-21Dès que le décès est constaté, l’Achar ferme les yeux et la bouche du défunt. Il allume de petites lampes (« tchangkien ») à l’aide de la flamme des bougies mortuaires qui étaient enflammée au moment du décès ce qui doit permettre à l’âme de se réincarner. Il convient en suite de laver le corps, de l’asperger de parfum. On le coiffe trois fois en arrière, puis trois en avant, ce qui symbolise les trois destinations possibles de l’âme : en enfer, sur la terre ou au paradis. On revêt ensuite le cadavre d’une écharpe blanche qui ceint le torse et repose sur l’épaule droite, d’un mouchoir blanc carré qui couvre le visage, de fil blanc enserrant poignées et chevilles, et enfin, d’un tissu blanc recouvrant tout le corps. On place alors le corps dans le cercueil que l’on loue, et l’on invite les moines pour prier. L’incinération des pauvres a lieu le jour même ou le lendemain matin. Celle des personnes plus aisées se déroule deux ou trois jours après le décès, temps pendant lequel des moines prient, un ou des Achar sont présents et où les parents et amis viennent présenter leurs condoléances. Ce laps de temps est accompagné par la musique mortuaire diffusée au moyen de mégaphone et à laquelle quiconque dans le voisinage ne peut échapper. Pendant des intermèdes, l’Achar parle au micro, soit pour requérir des offrandes, soit pour donner des renseignements sur la vie ou la crémation du mort, soit enfin pour souhaiter bonne chance à l’âme du défunt.

La procession funéraire :

crémationt_1920-93La procession funéraire a lieu le jour de la crémation et accompagne la dépouille mortelle de son foyer jusqu’au crématoire, qui se trouve dans l’enceinte d’une pagode. En tête, se tient un Achar qui brandit un « Tung Proleom » suivi des musiciens qui exécute les airs de la musique funéraires, le « Khlang Khaek ». Les instruments sont un « Pey » (flûte) et des « skor Yaul » (tambour des morts). Vont ensuite des gens qui jettent du polystyrène, ou des pétales, contenus dans des plateaux. Après, seul devant le char funèbre, marche le fils aîné, y compris par adoption, du défunt. Il s’est pour l’occasion rasé la tête et prend le froc, au moins pour la durée de la cérémonie. Le char est un camion camouflé en palanquin paré de draps blancs. Le cercueil est entouré de quatre porteurs. Suivent les parents directs, et enfin, les autres membres de la famille, amis et connaissances de la personne décédée.

La procession, ou plus simplement, les proches parents du défunt, doivent effectuer trois rotations autour du crématoire en le laissant à leur droite. Pour les personnes importantes, leur vie est brièvement relatée avant que leur corps ne soit brûlé.

crémationt_1920-103La crémation commence par une cérémonie comportant la déclamation des formules rituelles pendant que les vivants tournent trois fois autour du défunt. Une fois la crémation achevée, un Achar recueille les ossements résiduels. Ils sont lavés avec du jus de noix de coco, puis enveloppés dans un tissu blanc et enfermés dans un « Kot », urne surmontée d’un couvercle. Le Kot sera ensuite placé sur l’autel des ancêtres ou dans un stupa.
L’autel des ancêtres contiendra au moins une photo de la personne disparue.

Deux cérémonies importantes ont lieu à la suite de ces rites : La première a lieu sept jours après le décès. Il est en effet dit que l’âme ne se rend compte de la mort de l’enveloppe charnelle qu’elle revêtait qu’à ce moment-là qui est donc celui où elle s’en sépare. La seconde se passe cent jours après la mort et marque la fin de la période de deuil. Tables et couverts sont installés, très souvent sous une tente à même la rue. Des mégaphones orientés dans l’axe des rues hurlent des cassettes de musique mortuaire entrecoupée des renseignements donnés au micro par les moines sur la personne décédée, ses mérites ou des demandes d’offrandes et de dons.
Suivant la fortune de l’intéressé, ces mégaphones émettent plus ou moins longtemps, jusqu’à une semaine entière, du lever (4 heure du matin) au coucher du soleil (21 heures).
Chaque fois, les moines sont conviés pour faire des prières. Ces réunions sont surtout l’occasion de réunir toutes les connaissances et parents du défunt. Ils apportent des offrandes (nourriture ou argent) et se rencontrent autour d’un banquet. Ces deux journées sont accompagnées de la musique mortuaire diffusée par mégaphone.

 

Texte tiré du site : http://vorasith.online.fr/cambodge

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Dominique Gaye, originaire du nord de la France et vivant actuellement à Chalon/S parcourt l'Asie du Sud-Est (Laos, Vietnam, Thaïlande, Malaisie, birmanie, cambodge) depuis 1976 avec un attachement particulier pour la Thaïlande et le Cambodge. Ses premières photos furent des diapos. Sa dernière "mission" est en terre khmère de novembre 2015 à février 2016 où il a fait plus de 35 000 photos. Ces clichés sont des scènes de tous les jours, des grains de vie, des grains de riz... Vous trouverez d'autres photos de Bourgogne, de Prague, de Vilnius En route pour le voyage...en tuktuk (dites touktouk) ou comme vous voulez

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